Le quai de Ouistreham

Cette période d'une crise qui n'en finit pas met en péril les plus fragiles d'entre nous. En prenant la peine d'aller se mêler au "petit personnel", Florence Aubenas, journaliste réputée, se révèle courageuse. Rien ne l'obligeait, si ce n'est sa conscience professionnelle, à effectuer des tâches difficiles, respecter des horaires décalés, tolérer des patrons méprisants à l'égard de leurs employés.

Devenir femme de ménage, fut-ce pour un court laps de temps, qui aurait tenu ? Grâce à sa ténacité et à son sérieux, Florence nous dévoile un métier non reconnu, mal perçu auprès des citoyens, et pourtant, ce serait bien à eux, les techniciens de surface, de les toiser, sachant toutes les saletés amoncelées dans les bureaux, sous les sièges, dans les toilettes. Evidemment la paie de ces gens-là s'avère aussi misérable que la reconnaissance de leurs semblables.

Cette lecture permet de mettre un pied dans un monde mal connu et de constater, une fois encore, comme les inégalités professionnelles et sociales demeurent. Les politiques de tout bord débattent du déficit de la sécu, de l'âge de l'abaissement des retraites, ils posent (déjà) les jalons pour les prochaines présidentielles,  ils gagnent des millions, assurent leurs arrières, et pendant ce temps-là, une couche de la population trime à hue et à dia pour boucler ses fins de mois.

Véritablement, ce livre sensibilise et ouvre les yeux à ceux qui n'ont pas encore réalisé que pour certains Français, vivre décemment est un vrai combat. Une lecture intelligente, pour ne pas mourir idiot.

  Le quai de Ouistreham" Florence Aubenas (récit, éditions de l'Olivier, 19 euros